Presque tout le monde aime les arbres. Ils nous apportent plaisir et bienfaits. Cependant, il nous paraît plus important de cultiver la terre pour faire pousser des légumes, de trouver de l’eau de source ou d’aider à construire une nouvelle salle de classe que de consacrer notre temps et nos efforts aux arbres.
C’est vrai aussi que les arbres mettent du temps à pousser. Il faut parfois attendre cinq ans pour que les jeunes arbres produisent du bois de chauffage, du fourrage ou des poteaux de construction. Il y a deux clés à ce problème. D’une part, c’est de partager cette attente en faisant participer la communauté entière. D’autre part, c’est de combiner la plantation de cultures vivrières, ce qu’on appelle l’agrosylviculture. Cet article se penche sur la façon dont on peut procéder pour susciter à la fois l’intérêt et la participation des gens à un projet de plantation d’arbres.
Leur besoin
Si on leur demande, les villageois diront certainement qu’on a besoin d’arbres et ils en énuméreront de nombreux bienfaits. Mais planter des arbres est rarement perçu comme un besoin urgent de ce mois-ci ou cette saison des pluies. Il y a toujours quelque chose de plus important à faire.
Pour aider à la motivation des gens on peut leur montrer le lien entre la plantation d’arbres et celle de cultures vivrières…
- Les arbres aident à prévenir l’érosion du sol par la pluie ou le vent.
- Leur feuillage fournit de la nourriture au bétail ou peut servir de paillis aux légumes.
- Ils peuvent enrichir le sol.
- Les arbres fruitiers nous sont directement très bénéfiques.
Faites ces remarques lors de réunions de village pour sensibiliser la population en utilisant des moyens visuels ou même des spectacles de marionnettes. (Ceux-ci ont eu grand succès dans la province du Nil au Soudan). Maintenez l’intérêt du groupe en posant cette question :
Dans dix ans comment aimeriez-vous que soit votre village et ses environs ? »
Ceci aide le villageois à penser à des jours plus lointains, au-delà des pressants besoins quotidiens. Cette question sème la graine d’une vision pour l’avenir, comme on lit dans Proverbes 29 : 18 « Là où une vision n’existe pas, le peuple meurt ». Ceci est particulièrement important dans des projets de plantations à long terme.
Leur demande
La deuxième chose à faire pour les villageois c’est de demander de l’aide pour leurs projets de plantations. Quelquefois on peut faire des démonstrations qui réussissent. En Éthiopie en 1980, l’Église de Kale Heywet encouragea par le succès de sa plantation d’arbres les représentants locaux Kabele à s’informer sur la possibilité de plantation sur leur terrain. C’est de là qu’est née la plantation Bilate qui s’est développée et couvre maintenant plusieurs centaines d’hectares. Rien ne réussit mieux que la réussite et de bons « coins démonstration » peuvent stimuler l’information et l’intérêt. A Bilate la réussite du projet a fait que des voisins Kabele ont voulu participer. Aujourd’hui, huit y participent et il y a maintenant 30 km de zone boisée le long de la rivière Bilate, alors qu’avant, elle n’existait pas.
De nombreux visiteurs sont venus à Bilate et ont été très impressionnés. Les villageois sont fiers de ce qu’ils ont réalisé et ceci est très encourageant pour d’autres qui voudraient faire la même chose.
Leur terre
Il semble toujours que les arbres et les cultures vivrières se disputent la terre, mais ce n’est pas nécessairement le cas. Les arbres peuvent pousser sur une terre pauvre où la culture ne réussirait pas. On peut les planter aux coins des champs, le long des routes et dans les enclos.
A Bilate on s’inquiétait de ce que les arbres allaient réduire l’espace disponible pour faire paître les troupeaux. Donc, les villageois eux-mêmes décidèrent des limites exactes de la plantation, et de combien de terre lui serait consacrée. Ils se mirent aussi d’accord sur l’accès à la rivière : pour que les animaux puissent s’abreuver il y aurait un passage à travers la plantation. En fait, ils organisèrent même des bergers pour qu’ils s’assurent que la plantation soit bien gardée contre leurs propres troupeaux.
Leur travail
Si l’on s’engage dans une opération de plantation, c’est un engagement à long terme quant au travail demandé. Au début on peut encourager cet engagement, en donnant à différentes personnes la responsabilité de planter et de s’occuper de certaines parcelles d’arbres. Les gens voyant alors des parcelles autrefois pauvres et désertes renaître à la vie, leur engagement au travail nécessaire à long terme s’en trouve accru.
Les arbres ont besoin qu’on s’occupe d’eux, et en s’acquittant de cette tâche, notre appréciation et la valeur qu’on leur porte augmentent.
Leurs bénéfices
L’ingrédient final pour la réussite d’une plantation basée sur l’engagement de la communauté c’est de voir que les bénéfices lui reviennent directement. C’est dès le début de l’opération qu’on doit régler les problèmes concernant les locations des terres ou baux, les droits de chacun quant aux produits de la terre et à la façon dont ils seront repartis : ce sont là des sujets à régler par un comité de village.
Aussitôt que possible au cours du projet, les villageois devraient obtenir, pour leur usage personnel, des produits de la terre en question comme par exemple de l’herbe pour couvrir les toits, ou des branches qu’on vient de tailler des jeunes arbres. Ceci instituera une marche à suivre pour l’avenir et établira clairement dans les esprits que la nouvelle parcelle boisée est à eux. Dans de nombreux cas, l’échec des projets (commencés pourtant avec enthousiasme) est dû au fait qu’il ait été suggéré que ceux qui ont investi leur labeur dans le projet ne vont pas en être les principaux bénéficiaires.
Un Résultat Espéré
Isaïe (55 : 13) décrit clairement la transformation de pauvres terres incultes en fécondes terres boisées comme une façon d’honorer Dieu. Les inspecteurs du Gouvernement ont décrit le projet à Bilate cette année (1990) comme « le meilleur modèle de saine amélioration écologique pour les régions avoisinantes ». Ce sont les résultats de l’engagement déterminé, il y a presque dix ans, de l’église locale, engagement qui aujourd’hui encore continue.
Dr Julian Evans travaille pour la Commission Forestière du Royaume-Uni et est aussi Conseiller Forestier, de Tear Fund. Il est l’auteur de « Plantation Forestry in the Tropics »