Dr. Viv Grigg
D’après ONU-Habitat, d’ici à 2020, 1,4 milliard de personnes pourraient vivre dans des bidonvilles. De mon point de vue, il s’agit du plus grand défi de notre époque pour le ministère en milieu urbain. Voici ci-dessous quelques étapes que les habitants d’un bidonville doivent franchir pour sécuriser leur droits fonciers et avoir accès à de meilleurs services. L’ordre et la nature exacte de ces étapes peuvent varier d’un endroit à l’autre.
J’ai travaillé de nombreuses années en tant que pasteur dans un bidonville de Manille, la capitale des Philippines. Je me souviens du sang qui a éclaboussé les murs lorsque les soldats et les bulldozers ont détruit notre bidonville. Les membres de l’Église ont aidé les habitants à charger leurs matériaux de construction sur des camions, puis à reconstruire leur maison dans la « zone de réinstallation ». Ce nouveau site n’était pas approvisionné en eau et il était situé à 15 km des emplois en ville dont les gens dépendaient.
Le rôle d’un pasteur de bidonville consiste à se tenir aux côtés des personnes qui perdent leur habitation et leur terrain. Il s’agit de la première étape.
Je me suis néanmoins demandé si cette confrontation aurait pu être évitée ? Le prêtre qui travaillait dans la communauté avant moi avait été plus sage. Il s’était organisé avec les membres de la communauté en amont d’une confrontation précédente, de sorte que lorsque les bulldozers sont venus, les gens se sont allongés par terre devant les engins. Le prêtre a convoqué la presse écrite. Il a ensuite appelé le maire, pour lui dire que les journalistes et les cameramen étaient là. Il a conseillé au chef de police d’éviter le carnage parce que le maire s’apprêtait à venir.
Bien sûr, lorsque le maire est arrivé et qu’il a vu les journalistes, il a dit : « Nous devons régler tout ceci pacifiquement, par la discussion. » En fin de compte, les gens ont eu droit à la moitié du terrain. C’est la deuxième étape : le leadership avisé d’un leader communautaire qualifié.
La troisième étape, c’est l’organisation et le plaidoyer communautaires. Les représentants de la communauté doivent passer du temps avec les fonctionnaires locaux, suivre des conférences destinées aux travailleurs sociaux et aux universitaires. Cela leur permettra de se faire une réputation et de pouvoir solliciter les bonnes personnes en cas de besoin, comme l’a fait le prêtre dans l’exemple précédent.
La quatrième étape consiste à mener un plaidoyer en connaissance de cause. La recherche est essentielle. Chaque semaine, j’ai des appels Skype avec des travailleurs dans huit villes du monde. Ces travailleurs doivent se renseigner sur les systèmes complexes d’obtention des droits fonciers. Il y a souvent 40 à 80 étapes à suivre. Les questions de la recherche incluent : Quels bureaux délivrent quels titres ? De quelles informations ont-ils besoin ? Qui peut nous aider dans ces bureaux, et comment pouvons-nous éviter les personnes qui demandent un pot-de-vin ?
La cinquième étape implique qu’une personne se spécialise en plans de logements publics et privés. Cette personne devra acquérir de solides connaissances sur le plan financier. Cela aidera la communauté à la sixième étape : la fixation d’objectifs pour les groupes et les processus d’épargne. Les communautés auront probablement besoin de fonds pour les divers aspects de la réfection du bidonville et du processus d’enregistrement. La gestion des groupes d’épargne peut s’avérer difficile et des conflits peuvent survenir. Les dirigeants doivent avoir à la fois le coeur tendre et la peau dure !
La septième étape consiste à négocier des contrats d’envergure entre les organisations communautaires, les banques et les programmes de logement. Les leaders des bidonvilles peuvent devenir des experts en affaires et contribuer à organiser la prestation de meilleurs services pour la communauté. Dans une société ouverte telle que les Philippines, c’est chose possible. Dans les pays où la corruption est plus courante, cela s’avère bien plus difficile.
Huitième étape : C’est si difficile ! Renonçons !
Variante de la huitième étape : Nous nous souvenons que nous marchons avec Dieu dans ces endroits dangereux et éprouvants. Nous devons rester proches de lui dans ce combat. Avec l’aide de l’Esprit Saint, nous pouvons continuer.
Le Dr. Viv Grigg a mis sur pied une maîtrise en Leadership urbain transformationnel dans de multiples universités du monde. Il est le directeur de la Urban Leadership Foundation et coordonne l’Encarnação Alliance of Urban Poor Movement Leaders.
Pour une formation et de la documentation de référence sur les droits fonciers urbains, allez sur www.urbanleaders.org/655LandRights (en anglais)
Site internet : www.urbanleaders.org
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