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Articles

Action Communautaire et Environnement

Comment les communautés peuvent-elles aborder les problèmes écologiques politiquement sensibles

1994 Disponible en Anglais, Français, Espagnol et Portugais

Des numéros du magazine Pas à Pas en français, espagnol, portugais et anglais, étalés sur un bureau en bois.

De : Notre environnement – Pas à Pas 20

Comment être davantage conscient des enjeux environnementaux et développer des modes de vie durables

Comment les communautés peuvent-elles aborder les problèmes écologiques politiquement sensibles

par Andrew Leake.

De plus en plus souvent dans le monde entier, les communautés locales ont à faire face à des problèmes écologiques dont elles ne sont pas la cause. Par exemple, un village qui dépend d’une rivière pour son eau potable et son poisson peut se trouver brusquement devant une eau contaminée par une usine en amont. Pour résoudre ce problème, la communauté peut avoir à défier les intérêts économiques du patron de l’usine. Ceci peut conduire à des protestations, des campagnes, des batailles judiciaires et, dans des cas extrêmes, à la violence.

Un défi sans cesse croissant pour les agents de développement est de savoir comment aider des communautés dans des situations telles que celle que nous venons de décrire. A cause des intérêts économiques et politiqes qui sont en jeu, une intervention de ce type est très délicate. Ce n’est pas facile et on s’expose à toutes sortes de critiques et fausses interprétations. Nous devons cependant accepter que Dieu peut nous appeler à nous impliquer dans une affaire de ce genre. Il est important de réfléchir à notre ligne de conduite si le cas se présente.

Etude de cas

MOPAWI est une agence chrétienne de développement qui travaille avec les populations autochtones dans les forêts tropicales de l’Est de l’Honduras (en Amérique Centrale). Depuis 1985 elle a travaillé dans les secteurs de l’agriculture, de la santé, de l’éducation, du crédit, et dans des projets concernant les femmes.

Un partie du travail de MOPAWI se fait parmi les communautés des Indiens Tawahka le long de la rivière Patuca. En 1987, le personnel de l’agence s’est rendu compte que les forêts entourant cette région étaient abattues par des compagnies de bois de charpente, des propriétaires de ranchs et des agriculteurs qui descendaient la rivière pour chercher des nouvelles régions à exploiter. Le personnel a compris que si rien n’était fait, les Tawahkas allaient bientôt perdre les ressources naturelles dont leur économie de subsistance respectueuse de l’environnement dépendait depuis des siècles.

Reconnaître le problème

Jusque-là les Tawahkas n’avaient pas cru que leurs forêts étaient menacées. Comme nous l’a dit un de leur chefs: «Depuis mon enfance ces forêts n’ont jamais changé. Comment pourrais-je imaginer qu’il puisse en être autrement?» Donc, un premier pas pour aider les Tawahkas à traiter le problème a été de les aider à prendre pleinement conscience de la situation. Pour arriver à cela MOPAWI a emmené les chefs voir dans d’autres parties du pays d’autres groupes d’indigènes qui avaient déjà vu leurs forêts détruites. En parlant avec eux, ils ont commencé à comprendre ce que signifierait pour eux la perte de leurs forêts. Ils ne pourraient plus obtenir les matériaux nécessaires à la construction de leurs maisons ou leurs canoës, ils n’auraient plus d’espace pour chasser les animaux, récolter les plantes médicinales ou les fruits sauvages. Les terres souffriraient de l’érosion, les rivières s’envaseraient, le poisson disparaîtrait et il n’y aurait plus d’eau propre potable.

Ce processus de prise de conscience a continué, alors que les chefs Tawahka visitaient les régions proches de leurs communautés, là où l’on coupait précisément les forêts. C’est là qu’ils ont rencontré et parlé avec les propriétaires de ranchs et les agriculteurs, et leur ont demandé pourquoi ils venaient s’installer ici et défrichaient. Ils ont appris que beaucoup d’entre eux n’arrivaient pas à trouver de terres ailleurs et qu’ils n’avaient pas le choix: ils devaient couper la forêt. D’autres étaient seulement motivés par le gain et avaient pour but de faire des bénéfices rapides en coupant et en vendant les arbres, ou en élevant du bétail.

Donner l’alarme

L’expérience entière a été enregistrée sur vidéo et montrée plus tard à d’autres membres de la communauté. Forts de leur matériel audio-visuel, les chefs ont pu convaincre le reste de leur communauté du besoin d’agir pour protéger leurs forêts des nouveaux venus.

Une fois que le peuple Tawahka a eu pris la décision de protéger ses forêts, MOPAWI l’a aidé à rencontrer le gouvernement. Ceci lui a permis de découvrir clairement sa position légale concernant ses droits sur les forêts. Cela a aussi été le début d’un bon dialogue avec les autorités. C’était important car le gouvernement avait ainsi une idée claire de ce que faisaient les Tawahkas. Cela réduisait aussi toute possibilité de malentendu futur sur ce qui aurait pu autrement être considéré comme une sorte de rébellion politique.

L’élaboration de cartes

Les Indiens, avec l’aide technique de MOPAWI, ont travaillé ensuite à documenter leur situation. Ils ont fourni à un géographe professionnel des renseignements concernant l’utilisation de leurs forêts. En retour, celui-ci mettait ces renseignements sur des cartes. Une autre carte faite par le géographe montrait la localisation et l’étendue du déboisement, jusqu’à quel point la forêt avait diminué et l’importance de sa protection.

Ces renseignements ont aidé les Indiens à comprendre encore mieux leur situation et ont ajouté un argument écologique à leur cas. En utilisant ces informations, ils ont pu expliquer clairement et simplement leur problème au gouvernement et aux autres. Les cartes aidaient à clarifier la situation. Elles rendaient aussi difficile l’usage d’informations trompeuses à ceux qui s’intéressaient par intérêt politique ou économique à voler les terres des Indiens. Ces cartes ont, en fait, été utilisées plus tard par le gouvernement comme base pour tracer les plans d’une réserve qui, si elle devient légale, protègera les forêts des Tawahkas.

Les cartes et la vidéo ont également eu l’avantage de pouvoir être utilisées par la presse. La situation des Tawahkas a été ainsi plus largement connue. Ils ont généré l’intérêt et le soutien public qui à leur tour ont poussé le gouvernement à étudier leurs revendications.

Tout au long du processus, la relation entre les Tawahkas et MOPAWI dans le soutien de leur cause a connu des phases difficiles. Quelquefois les Indiens étaient profondément divisés entre eux à cause de malentendus au sein de leur communauté. Des problèmes financiers, une mauvaise gestion de fonds appartenant au projet, ont parfois fait perdre au peuple la confiance qu’il avait en ses chefs. Des personnes venues d’ailleurs accusaient quelquefois MOPAWI d’avoir des intérêts économiques ou des motivations politiques dans l’affaire. Ces problèmes ont été surmontés grâce à la prière et à la patience. L’important est que les Tawahkas aient réussi à présenter leurs problèmes devant le gouvernement, en évitant toute confrontation directe avec les propriétaires de ranchs, les agriculteurs et les marchands de bois.

Points à considérer

Même si les situations sont différentes, l’expérience de MOPAWI peut être utile pour l’étude de questions importantes qui se posent à d’autres organisations engagées aux côtés des populations pour résoudre des problèmes d’environnement politiquement délicats…

  • Les soucis et les actions de la communauté peuvent être incompatibles avec les intérêts économiques et politiques des responsables du problème. Les conséquences possibles de cette situation devraient être sérieusement étudiées avant toute mise en route d’une action.
  • La communauté devrait s’approprier le problème (ce n’est pas celui de l’agent de développement) et être totalement responsable des décisions prises et des actions choisies pour le résoudre.
  • Pour aider une communauté à prendre une décision, le personnel ou l’agence de développement devrait l’aider à rassembler toutes les informations possibles sur le problème qu’elle affronte. Ils doivent lui laisser le choix d’agir ou non et de décider comment agir au mieux.
  • Si une agence de développement a décidé de soutenir une communauté dans leur entreprise d’une action, un plan d’action global doit être organisé (voir cidessous) pour s’assurer que ce qui est proposé entre dans le cadre du mandat légal de l’organisation.
  • Des lignes directrices claires devraient être établies pour les agents de développement responsables de cette tâche, indiquant le contenu et les limites de leur engagement dans la communauté, pour la recherche d’une solution.
  • A cause de la nature politique de ce type d’engagement, l’agence de développement et son personnel doivent développer un haut niveau de confiance dans la communauté et maintenir une conmmunication claire et continue avec elle.
  • L’agence de développement devrait avoir un rôle de soutien plutôt que de direction dans les actions choisies par la communauté. Ce soutien devrait aider à identifier et à fournir des voies permettant à la communauté d’agir par elle-même.
  • Mettre l’accent sur la rédaction de documents et la publication des faits concernant le problème. Ceci aide à cerner le problème et à l’isoler des autres intérêts politiques auxquels il pourrait facilement être mêlé. «Cartographier le problème» est souvent une bonne façon d’y réussir. Cela aide aussi la communauté à se rapprocher, à développer une meilleure compréhension de sa situation et aussi à l’expliquer objectivement à d’autres (voir Pas à Pas 17).

Phases d’engagement

Il est peut être utile d’identifier les différentes phases de l’approche de MOPAWI lors de son travail avec les Indiens Tawahka. Celles-ci pourraient servir de lignes directrices à d’autres groupes…

Développer la prise de conscience La communauté prend conscience du problème qu’elle rencontre. Elle reçoit un appui pour en identifier les causes et les implications.

Décider de l’action à engager Après avoir étudié le problème et les difficultés rencontrées pour trouver une solution, la communauté doit prendre la responsabilité de décider si oui ou non elle s’engage dans une action. C’est elle et tous ses membres qui auront à endosser les conséquences de l’entreprise choisie.

Travailler sur la base des faits Rassembler l’information et diffuser les données du problème. Ceci réduit la capacité du parti adverse à influencer l’opinion publique par l’utilisation de faits inexacts ou de présentations incorrectes.

Chercher des appuis à la cause Sensibiliser l’opinion publique et la mettre de son côté est particulièrement important si la communauté est petite et a peu d’influence politique. Cela accroitra les chances de la communauté de faire entendre et accepter ses revendications.

Andrew Leake a travaillé avec MOPAWI pendant quatre ans. Il fait maintenent un doctorat à l’Université de Hertfordshire. Ce doctorat traite des modèles d’utilisation de la terre parmi les populations autochtones du Paraguay. Son adresse est: 45 Walton Street, St Albans, AL1 4DQ, Royaume Uni.

Action communautaire pour protéger l’environnement

par Beatrice Akoth

Les Communautés peuvent prendre plusieurs mesures pour protéger leur environnement:

1. Identifier et comprendre les causes de tous les changements qui ont lieu dans l’environnement local, surtout les plus préjudiciables.

2. Organiser des systèmes d’utilisation du sol appropriés qui réduiront ou empêcheront d’autres détériorations. Par exemple: mesures de conservation du sol et de l’eau, plantations d’arbres etc.

3. Organiser des réunions communautaires pour encourager la communauté entière à soutenir totalement ces mesures. Il peut être nécessaire d’établir des règles de protection écologique locales pour s’assurer que les gens protègent la totalité de l’environnement.

4. Encourager les gens à planifier leur avenir. Les systèmes agricoles locaux sontils en mesure d’assurer une utilisation viable des ressources naturelles, autant pour les générations futures que pour la population actuelle?

Pour être en mesure de parcourir toutes ces étapes, tous les membres de la communauté devraient être formés à une perception globale de leur environnement. Les gens doivent comprendre que chacun de nous apporte une contribution essentielle dans ce domaine. Les activités de protection de l’environnement doivent commencer dans nos foyers et s’étendre à nos communautés. Ensemble, nous pouvons peut-être éviter les conséquences désastreuses des abus écologiques qui ont abouti à la sécheresse, la désertification, la famine, la maladie et parfois même la mort.

Beatrice Akoth est écologiste de profession. Elle a reçu sa formation à l’Université de Makerere à Kampala en Ouganda. Son adresse est: PO Box 7009, Kampala, Ouganda.

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