La longue gousse, une portion ouverte (gauche) et la graine ailée
Le groupe d’ingénieurs écologistes à l’université de Leicester, Royaume Uni, a étudié l’utilisation possible de coagulants naturels pour le traitement des eaux à grande échelle. Ils ont étudié les propriétés coagulantes naturelles des graines broyées de l’arbre Moringa oleifera. Celui-ci est natif de l’Inde du nord, mais pousse aussi maintenant sous les tropiques. On le connait parfois sous le nom de «baguette de tambour» à cause de la forme de ses gousses ou encore de «raifort» (qui décrit le goût de ses racines). Le moringa pousse rapidement à partir de graines ou de boutures, même sur sols pauvres. Il ne nécessite guère de soins et peut survivre à de longues périodes de sècheresse. Sa pousse est rapide: jusqu’à 4 mètres en hauteur avec floraison et production de fruits observées durant l’année suivant la plantation, lors des essais près de Nsanje au Malawi du sud. Dans certaines régions de l’Inde du sud, deux récoltes de fruits en gousses sont possibles au cours d’une seule année. Comme la liste ci-contre le montre, l’arbre a de multiples utilisations.
Le traitement de l’eau domestique
Les gousses doivent mûrir sur l’arbre et sont ramassées une fois sèches. Les enveloppes et «ailes» légères des graines se retirent facilement laissant apparaître la graine elle-même, toute blanche. Elles sont ensuite finement broyées et pilonnées en utilisant mortier et pilon. La quantité de graines broyées nécessaire au traitement de l’eau d’une rivière dépend de la quantité de matières en suspension qu’elle contient. Les utilisateurs se familiarisent rapidement avec les besoins variables de leur eau, en fonction de la saison et de la quantité de sédiments en suspension.
Pour traiter 20 litres d’eau (quantité moyenne transportée dans un grand seau) environ 2 grammes de poudre sont nécessaires (2 cuillères à café de 5 ml rases ou 2 capsules de bouteilles de soda avec le dos rond). Ajoutez une petite quantité d’eau propre à la poudre de graines pour en faire une pâte. Mettez la pâte dans une bouteille propre (une bouteille de soda est idéale) Ajoutez une tasse (200 ml) d’eau propre et secouez pendant 5 minutes. Ceci active les produits chimiques dans les graines écrasées
A l’aide d’un tissu de coton blanc, filtrez cette solution dans un seau de 20 litres rempli d’eau de rivière. Mélangez-en le contenu rapidement pendant 2 minutes suivies de 10 à 15 minutes beaucoup plus lentement. Pendant que vous remuez lentement, les graines de moringa lient ensemble (ou coagulent) les fines particules et bactéries pour en former de plus grosses qui ensuite coulent et se déposent au fond du seau. Au bout d’une heure, vous avez de l’eau claire.
Ce procédé rendra l’eau claire et retirera 90–99% des bactéries attachées aux particules solides. Cependant, certains micro-organismes nocifs risquent d’être encore présents dans l’eau surtout si l’eau est très polluée. Pour obtenir de l’eau potable, une purification plus poussée est recommandée, soit en la faisant bouillir soit en la passant dans un filtre contenant du sable. Les graines séchées (retirez celles qui sont décolorées) et la poudre peuvent être stockées. La pâte doit, toutefois, être préparée fraiche chaque jour.
Le traitement de l’eau à grande échelle
Notre travail expérimental a été conduit à Thyolo, au Malawi du sud, où une station de traitement des eaux avait été construite comme un système modèle pour le traitement des eaux du village. L’énergie électrique n’est pas nécessaire à l’opération. Au Malawi, en 1993, les produits chimiques importés d’Afrique du Sud coûtaient aux autorités plus de £400,000 en précieuses devises étrangères. Nos essais d’utilisation des graines de moringa ont donné des résultats de purification aussi bons que ceux obtenus avec les produits chimiques commercialisés, ceci à un coût minime. On a besoin de 50 à 150 mg de graines broyées pour 1 litre d’eau. De simples tests dans des pots déterminent les quantités de graines nécessaires.
De nombreux pays en voie de développement pourraient économiser d’énormes sommes d’argent en adoptant ces idées.
Le moringa comme légume et source d’huile
Les gousses de moringa sont des légumes commercialisés dans toute l’Inde. Dans le sud, de nombreuses variétés qui ont des temps de pousse et des gousses de longueurs très variables ont été sélectionnées. On les vend fraîches sur les marchés locaux. Les gousses vertes immatures sont coupées en morceaux et mises en boîtes dans la saumure, pour être exportées vers l’Europe et l’Amérique.
Ailleurs dans le monde, les arbres moringa sont aimés des villageois pour leurs gousses et leurs feuillages. Les feuilles contiennent un taux de protéines élevé (27%) et sont riches en vitamines A et C, en calcium, fer et phosphore. L’un des avantages de cet arbre est que l’on peut cueillir ses feuilles à la saison sèche, lorsqu’il n’y a aucun autre légume sur le marché.
Les graines de moringa contiennent en poids 40% d’huile. Les tests faits en laboratoire à Leicester ont confirmé que les tourteaux obtenus après extraction de l’huile, contiennent encore des coagulants actifs. On peut les utiliser pour traiter l’eau de la même façon que le procédé déjà décrit. Ces tourteaux peuvent être séchés et stockés. On peut les obtenir gratuitement comme sous-produit de la fabrication de l’huile.
Ceci constitue un point très important. Les graines de moringa servent d’abord à la fabrication de l’huile sans que leur efficacité à traiter l’eau n’en soit réduite. L’huile de moringa est de haute qualité et sa valeur commerciale est potentiellement élevée. L’huile est d’une égale valeur pour la cuisine et un ingrédient essentiel pour la fabrication du savon. La demande en huile du Malawi est largement supérieure à la production présente du pays. De l’huile de soja est donc importée d’Amérique du sud.
Une visite a été faite dans un village du sud du Malawi possédant de nombreux arbres moringa, couverts de gousses vertes. Les arbres sont très appréciés pour la source en légumes qu’ils représentent, mais les villageois n’avaient pas ramassé les gousses car ils n’avaient pas les moyens d’importer l’huile nécessaire pour les faire cuire et ils ne savaient pas que l’arbre était lui-même une source d’huile.
Conclusions
On devrait encourager la plantation du moringa sur toute les petites propriétés. Les agriculteurs verront ainsi leur santé et leurs revenus s’améliorer. Cet arbre précieux fournira des légumes frais et des matières premières pour l’extraction de l’huile. Une technologie simple est disponible pour encourager l’établissement de petits moulins à huile dans les régions rurales. Les tests sont exécutés par ITDG, Zimbabwe.
Le grand potentiel de l’arbre et de tous ses produits n’a pas été reconnu. Au Nigéria du sud, l’arbre moringa est connu comme idagba manoye – ce qui veut dire «il pousse comme un fou». Nous espérons qu’à l’avenir, le bon sens prévaudra et que le vrai potentiel de cet arbre et de tous ses produits sera reconnu.
Geoff Folkard et John Sutherland sont membres du groupe des ingénieurs écologistes de l’université de Leicester. Ils vous invitent à leur écrire au sujet de la culture des nombreuses variétés de Moringa oleifera et de vos expériences concernant l’extraction de l’huile et son utilisation. Vous pouvez les contacter à:
Department of Engineering University of Leicester Leicester LE1 7RH Royaume Uni.
Moringa oleifera. Si les lecteurs ont du mal à identifier des spécimens locaux, de petits paquets de graines peuvent être obtenus en écrivant à: ECHO 17430 Durrance Road North Fort Myers Fl, 33917-2200, Etats Unis. Vérifiez d’abord les lois de votre pays quant à l’importation de graines légumineuses.