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De l’eau pour les pauvres des villes

Richard Franceys. L’accès facile à l’eau est un problème qui prend de l’ampleur à travers le monde. D’où vient l’eau des gens qui habitent les quartiers pauvres et les bidonvilles sans cesse plus nombreux dans les grandes villes du monde? Comment font ces gens pour se débarrasser des excréments et déjections, sans avoir accès aux installations sanitaires?

2002 Disponible en Anglais, Français, Espagnol et Portugais

Photo : Mike Webb/Tearfund

De : L’eau – Pas à Pas 51

Améliorer l’accès à l’eau potable en quantité suffisante

Richard Franceys.

L’accès facile à l’eau est un problème qui prend de l’ampleur à travers le monde. D’où vient l’eau des gens qui habitent les quartiers pauvres et les bidonvilles sans cesse plus nombreux dans les grandes villes du monde? Comment font ces gens pour se débarrasser des excréments et déjections, sans avoir accès aux installations sanitaires?

Photo: Mike Webb/Tearfund

Photo: Mike Webb/Tearfund

Sources d’eau

Les plus pauvres obtiennent souvent leur eau après avoir fait la queue pendant des heures, parfois dès trois heures du matin, à une colonne d’alimentation, un puits pollué ou un branchement illégal. De nombreuses personnes obtiennent l’eau des porteurs d’eau : petits fournisseurs indépendants qui leur font payer dix ou vingt fois plus cher le bidon d’eau que les gens riches ne paient pour avoir l’eau courante dans leurs maisons.

Les gouvernements promettent souvent zune eau bon marché pour que tout le monde puisse subvenir à ce besoin vital et précieux: l’accès à l’eau potable. Pourtant, d’habitude les lois gouvernementales interdisent aux fournisseurs de faire des branchements dans les zones d’habitation non planifiées et donc illégales, même si la moitié des habitants de la ville y vivent, dont les plus pauvres. Tous ces gens-là ne reçoivent donc aucun soutien du gouvernement pour avoir de l’eau. Ce sont les foyers aux revenus plus élevés, habitant dans les quartiers planifiés qui reçoivent la plus grande partie de l’aide gouvernementale. Les plus pauvres sont à la merci des gangs criminels qui souvent contrôlent l’approvisionnement illégal en eau.

Il arrive que des habitations pauvres soient juste à côté des tuyauteries de l’adduction d’eau. Ils seraient prêts à payer leur eau si on leur permettait de verser de petits acomptes réguliers. Cependant, les services publics d’eau font payer le branchement très cher et exigent aussi que les nouveaux clients paient les tuyauteries qui conduisent chez eux. Les pauvres des villes peuvent rarement épargner assez pour verser ces grosses sommes à l’avance. Ils sont donc obligés d’acheter l’eau à des voisins plus riches qui ont une alimentation par canalisation et qui peuvent demander un prix élevé.

Problèmes d’assainissement

L’accès à une bonne installation sanitaire est également difficile. Des latrines bien construites fournissent un excellent système d’assainissement mais ceux qui habitent les bidonvilles, peu sûrs de leur avenir, n’ont pas les moyens de construire des latrines. Les gens sont donc obligés d’utiliser des toilettes publiques sales, les bords des rues au petit matin ou même de subir l’indignité de « ramasser » leurs excréments dans un journal ou un sac en plastique et les jeter ensuite dans un égout ou sur un dépotoir. Pendant ce temps-là, de nombreux gens riches tirent simplement les chasses d’eau de leurs toilettes branchées au tout à l’égout (le système d’installation sanitaire le plus cher) qui aura aussi été subventionné par le gouvernement.

Beaucoup de services gouvernementaux ne semblent pas capables de relever le défi en fournissant une solution à ce problème : ils n’ont peut-être pas les fonds necessaries pour améliorer les services d’eau et d’assainissement, ou ils n’ont pas la volonté politique ou la capacité de trouver des façons de desservir ces zones d’habitations illégales mais sans cesse plus nombreuses. Il y a pourtant une bonne nouvelle : les organisations non gouvernementales (ONG) commencent à agir dans quelques villes.

Organisations communautaires

Dans le monde entier, les ONG et les organisations basées dans les communautés essaient d’aider les pauvres des villes. A Dhaka, au Bangladesh, l’ONG Dusthya Shasthya Kendra (DSK) travaille avec les communautés des bidonvilles et les services d’eau de Dhaka. Après avoir conclu un accord avec un comité de femmes pour la gestion des eaux communautaires (soutenu par un comité consultatif d’hommes), un réservoir d’eau est construit sur un terrain proche (offert par la municipalité de Dhaka). La communauté paie les factures d’eau et petit à petit rembourse aussi les 600$ investis pour la construction du réservoir et le branchement.

La surveillante du point d’eau, une femme appartenant au comité avec un salaire de 11$ par mois, se charge de rassembler l’argent que paient les usagers. Avec le soutien de l’ONG, elle dépose cet argent sur un compt joint à la banque. C’est la communauté qui fixe le prix de l’eau. Le prix moyen n’est maintenant égal qu’à un tiers de ce que les usagers payaient auparavant. Au début, l’ONG aide à la gestion du compte en banque, mais après ce sont les communautés qui en ont la totale responsabilité.

En Inde, l’ONG Sulabh International construit des blocs sanitaires comprenant douches, savon et espace-rangement dans les zones d’habitation défavorisées. Il faut payer une petite somme pour s’en servir (sauf les gens très pauvres et les handicapés qui entrent gratuitement). Le gouvernement participe au coût de la construction. La modeste somme payée pour l’utilisation sert à entretenir les lieux et à payer le salaire d’un gardien. Sulabh a maintenant 4 000 blocs sanitaires en Inde et encourage aussi un programme de latrines à fosse double. Ils fournissent des installations sanitaires à environ dix millions de personnes.

Ces exemples montrent ce qu’on peut arriver à faire. Mais il est difficile pour les ONG de subvenir aux besoins d’autant de gens pauvres dans les villes. Même avec le succès de Sulabh, la majorité des pauvres en Inde n’ont pas accès à des installations sanitaires améliorées. La majorité des 400 millions de gens pauvres du monde vivant dans les villes n’y ont pas accès non plus. 170 millions d’entre eux ne peuvent pas s’approvisionner en eau de bonne qualité.

Partenariats secteur privé – secteur public

Des recherches récentes dans plus de dix pays asiatiques ont montré une réponse inattendue pour résoudre les problèmes des pauvres des villes : « la privatisation ». Dans plusieurs villes du monde, la participation du secteur privé à ce qu’on appelle « Partenariat Privé–Public » (PPP) a un impact important sur les pauvres.

Les dirigeants d’entreprises privées peuvent apporter une meilleure gestion et de nouveaux investissements. Il peut en résulter par exemple que l’eau potable coulera 24 heures par jour à une pression acceptable au lieu de deux heures par jour à basse pression. En travaillant en partenariat avec le gouvernement et les organisations communautaires, certaines de ces entreprises privées servent les pauvres par leur approche participative. Par exemple, elles peuvent réduire les frais de branchement si la communauté aide à poser les canalisations dans le bidonville, ou bien elles peuvent permettre aux gens de payer le coût de leur branchement sur deux ans, en majorant d’une petite somme leurs factures mensuelles.

Grâce à l’action d’un de ces PPP, une résidente à Manille dit qu’elle dépensait 40 pesos par jour pour l’eau qu’elle achetait à un porteur d’eau mais que maintenant elle ne paie qu’entre 25 et 50 pesos par mois ! Un autre raconte qu’il payait un forfait de 300 pesos par mois à un voisin mais que maintenant il ne dépense qu’environ 60 pesos par mois.

Pendant les discussions de groupes sur ce thème, les participants ont dit qu’ils pouvaient maintenant se permettre le luxe d’une douche quotidienne grâce à la meilleure pression de l’eau. En plus de la diminution du coût de l’eau, les gens ont mentionné aussi d’autres avantages tels que:

  • le gain de temps (maintenant disponible pour d’autres tâches ménagères)
  • plus de temps de loisirs
  • moins de stress (il y avait beaucoup de disputes quand les gens n’attendaient pas leur tour pour puiser de l’eau)
  • un approvisionnement régulier.

Dans un bidonville à F Carlos, Manille, beaucoup de maisons ont été améliorées après le branchement d’eau individuel. Elles avaient été essentiellement construites en matériaux temporaires, mais maintenant la plupart sont construites en matériaux plus permanents (des parpaings et du ciment). Les mères de familles ont maintenant plus de temps pour s’occuper de leurs enfants et d’autres résidents utilisent ce temps libre pour participer à des activités rémunératrices.

Pourquoi ces exemples d’entreprises privées ont-ils eu tant de succès? Il y a plusieurs raisons:

  • C’est leur intérêt commercial de servir tous les clients potentiels.
  • Elles peuvent faire des bénéfices même en pratiquant des prix bas.
  • Elles ont souvent des contrats avec les gouvernements exigeant qu’elles offrent des niveaux de service élevés aux gens pauvres.

Que pouvons-nous faire?

Que peuvent faire de ces idées les lecteurs de Pas à Pas? Nous pouvons faire part des résultats de ces recherches sur les PPP et faire pression sur nos gouvernements pour qu’ils les considèrent comme une approche potentielle. Nous pouvons faire pression sur nos personnalités politiques pour qu’elles améliorent les services d’eau des pauvres. Nous pouvons leur demander de se fixer comme objectif un service d’alimentation en eau pour 100% de la population de façon que les pauvres des villes soient toujours inclus dans leurs projets.

A travers nos églises et les ONG, nous pourrions établir des associations de crédit pour financer, entre autres, des canalisations et des branchements d’eau. Nous pouvons discuter avec les gens qui vendent de l’eau à leur voisin du prix considéré comme raisonnable pour un juste service. Nous pourrions même peut-être considérer la construction d’un bloc sanitaire style Sulabh, avec savon et douches, en nous assurant qu’il reste propre et hygiénique. Ceci pourrait être une extension intéressante de l’exemple de Jésus lavant les pieds dans Jean 13:1-17, n’est-ce pas?

Richard Franceys travaille à l’Institute of Water and Environment, Cranfield University, Silsoe, Bedford MK45 4DT, Royaume-Uni. Il était le chef d’équipe de l’étude de l’Asian Development Bank intitulée ‘Beyond Boundaries : Extending Services to the Urban Poor’ (‘Au-delà des frontières : étendre les services aux pauvres des villes’). Celle-ci a servi d’étude de cas dans cet article. E-mail : [email protected] 

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